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Mangez moins gras, une obsession malsaine

En incitant à diminuer les graisses et manger plus de glucides “complexes”, la politique nutritionnelle française se fourvoie

La politique nutritionnelle, celle du Programme national nutrition santé (PNNS) est, depuis 2000, fondée sur le principe qu’il faut manger peu de graisses et de grandes quantités de glucides pour être mince et en bonne santé. De même au niveau européen, l’EFSA préconise une des apports en graisses compris entre 20 et 35% de l’apport énergétique total. Seuls les experts de l’ANSES sont plus libéraux : ils ont fixé la limite inférieure à 35 % et la limite supérieure à 40 % de l’apport énergétique total, des valeurs proches de celles préconisées par LaNutrition.fr.

Les Français sont aujourd’hui persuadés que l’ennemi, c’est le gras. Dans des sondages récents, la majorité des personnes interrogées citent les matières grasses en tête des aliments qu’il faut diminuer pour maigrir, et près de 60% pensent qu’on consomme trop d’huile.

La guerre aux corps gras

La guerre contre les corps gras a été initiée dans les années 1960, au prétexte que les graisses alimentaires feraient grossir et boucheraient les artères. Cette hypothèse se fondait sur le fait que gramme pour gramme, les graisses apportent deux fois plus d’énergie que les glucides, que les graisses saturées sont associées à un cholestérol plus élevé, et qu’on trouve des graisses et du cholestérol dans les plaques d’athérome. Par ailleurs, des travaux préliminaires avaient montré que les graisses sont moins rassasiantes que les glucides, notamment les glucides dits « complexes » (pain, pâtes, pommes de terre, riz…), censés libérer progressivement leur énergie.

Les études d’observation publiées à l’époque soutenaient cette hypothèse : les populations qui mangeaient de grandes quantités de glucides, comme en Asie et en Afrique, étaient plus minces que celles qui mangeaient des graisses.

En dépit d’un niveau de preuves pourtant faible, les nutritionnistes et les autorités sanitaires, d’abord aux Etats-Unis puis en Europe, ont conseillé à la population de manger plus de glucides et moins de graisses. Comme indiqué plus haut, ce message (diminuer les graisses, et des féculents à chaque repas) est gravé dans les préconisations du PNNS, selon des objectifs fixés en 1999 par un “comité d’experts”.

L’industrie alimentaire a emboîté le pas du « moins gras », en éliminant les corps gras d’un grand nombre de ses produits, rebaptisés « allégés » ou « 0% ». Nous avons aujourd’hui du beurre et des sauces allégées, des yaourts 0%, de la viande maigre, des plats préparés pauvres en graisses. Dans beaucoup de ces aliments, les graisses ont été remplacées par des amidons natifs ou transformés, c’est-à-dire… des sucres.

Lire : Halte aux aliments ultra-transformés ! Mangeons Vrai, le livre-manifeste d’Anthony Fardet

Des résultats calamiteux

Toutes ces mesures allaient, selon leurs initiateurs, faire chuter obésité, surpoids et diabète. Pourtant, les taux d’obésité et de diabète ont fortement progressé, non seulement aux Etats-Unis mais aussi en France.

Comment l’expliquer ? Des études d’observation récentes et mieux conduites qu’autrefois montrent en réalité que les aliments gras comme l’huile d’olive, le chocolat, l’avocat, contribuent à la satiété et sont associés à une prise de poids plus faible que les produits céréaliers transformés, les pommes de terre et d’autres aliments glucidiques. Les études d’intervention suggèrent aussi que pour maigrir il vaut mieux diminuer les glucides que les graisses.

Le fiasco s’étend aussi à la prévention des maladies cardiovasculaires. Dans les études Look Aheadet WHI, la réduction des graisses n’a pas permis de faire baisser les taux d’infarctus, alors que dans l’étude Predimed, augmenter les corps gras a conduit à des bénéfices.

Lire : Diabète, obésité, les graisses ne sont pas nos ennemies

Il est temps, comme nous le disons avec de nombreux chercheurs depuis des années, de reconnaître que les conseils officiels ont fait fausse route et qu’ils poursuivent hélas sur leur lancée. Ainsi, l’étiquetage nutritionnel Nutriscore accorde une mauvaise note à l’huile d’olive mais une bonne note aux corn flakes alors que c’est précisément l’inverse qu’il conviendrait de faire.

Chacun devrait aujourd’hui tirer les conclusions de bon sens qui s’imposent pour sa santé et celle de sa famille : la plupart du temps, il est inutile de diminuer les graisses alimentaires ; mieux vaut apprendre à les équilibrer. Quant aux féculents, il faut les choisir peu ou pas transformés, et les consommer non pas systématiquement à chaque repas comme le préconisent les pouvoirs publics, mais selon son niveau d’activité physique : les besoins en glucides des sédentaires sont certainement plus faibles que ceux des personnes actives.

Des conseils de nutrition censés, basés sur la science, sont dans La Meilleure Façon de Manger

(Article de Lanutrition.fr Publié le 11/10/2016 Mis à jour le 13/07/2017)

Sources

D’après “Low fat diets stuffed with misconceptions”, par David Ludwig, CNN, octobre 2016.

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